Texte de présentation de Françoise Robin / Introductory text by Françoise Robin


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REGARDS COMPARES : TIBET
 
Après la Chine et ses grands travaux, en 2012, le Festival Jean Rouch ouvre en 2013 sa programmation au Tibet. Croisant les regards, ces quatre journées de films proposent un panorama étendu d’images tibétaines dans le temps et l’espace, comme il est de coutume dans les « Regards Comparés » : en effet, la série démarre par des images d’archives britanniques des années 1930 et 1940 jusqu’ici rarement vues. Des réalisateurs occidentaux sont également convoqués pour compléter le panorama et offrir leur vision du Tibet, centrée autour de personnages d’exception. La part belle est toutefois délibérément ménagée aux réalisateurs tibétains, dont nous souhaitons faire découvrir la production hors des frontières : si Tenzing Sonam, Ritu Sarin et Tenzing Sherpa ont pu par leur présence en exil développer une notoriété incontestée en Occident, il n’en est pas de même pour les autres réalisateurs tibétains que nous avons le plaisir de présenter. Tashi Zangpo, Namgyal Lhadze, Pema Tashi et Khashem Gyal sont des pionniers, des protagonistes de la première vague de la représentation documentaire de soi par les Tibétains du Tibet. Issus d’une génération qui a découvert le numérique à l’adolescence, ils s’emparent de la caméra pour donner à voir, à leurs congénères comme à nous-mêmes, des personnages, des phénomènes, des moments, que pourraient difficilement capter des non-Tibétains, ne serait-ce qu’en raison des problèmes de langue et d’accès au terrain, problèmes qui se posent à tout documentariste qui souhaite effectuer un travail de manière indépendante et libre au Tibet. Une soirée est réservée au cinéma de Tenzing Sonam et Ritu Sarin, documentaristes en activité depuis plus de vingt ans en Inde, et qui sont les fers de lance du documentaire tibétain en exil. Une autre sera consacrée à Chenaktsang Dorje Tsering, poète et documentariste, citoyen du monde et profondément tibétain à la fois : tout comme il sait le faire dans sa poésie reconnue comme une des plus subtiles du Tibet d’aujourd’hui, il met ici son regard d’homme libre au service du cinéma, tout en ayant soin de laisser au spectateur une grande marge d’interprétation. C’est donc un message d’espoir, contre vents et marées, que ces Regards Comparés proposent : dans le Tibet en souffrance, et pour paraphraser le titre d’un célèbre poème tibétain de Dondrubgyäl (1953-1985) publié au sortir de la révolution culturelle, « Ici aussi un cœur bien vivant palpite ».
 

                                                                                      1 Pour texte françoise Robin

 

 

 
 
Françoise ROBIN
Professeure de langue et de littérature tibétaines à l’Institut National  des Langues et Civilisations Orientales