Regards comparés

En 1978, sont organisés des Regards Comparés. Le principe est de faire se rencontrer des films réalisés, sur un sujet semblable, à différentes époques et par différents réalisateurs (voyageurs, cinéastes, journalistes, anthropologues…). Cette première manifestation, sous la présidence de Georges Henri Rivière, d’Enrico Fulchignoni et du professeur Meyer-Fortes, était consacrée aux films réalisés chez les Yanomami (Vénézuela et Brésil), depuis l’origine du cinéma jusqu’aux productions récentes.

Jean Rouch présentait cette première édition avec les deux citations suivantes :

« l’œil de l’étranger ne voit que ce qu’il sait » (proverbe ghanéen)

« Je suis le ciné-œil, je suis l’œil mécanique, moi, machine, je vous montre le monde comme seul je peux le voir…» (Manifeste des Kinoki, 1923)

Il rappelait également que lorsque Dziga Vertov écrivait en 1923 ce Manifeste il pensait comme les Frères Lumière ou Regnault que la caméra est un outil de recherche permettant de décrypter le monde et les hommes mais qu’il ne suffit pas « de représenter sur l’écran des fragments partiels de la vérité comme des miettes éparses. Ces fragments doivent être élaborés en un ensemble organique qui est, à son tour, la vérité thématique… »

D’autres manifestations du même ordre s’ensuivront de manière irrégulière jusqu’en 1987 :
en 1979 : les Bushmen du Kalahari au Botswana ;
en 1981 : les Dogon du Mali.
en 1986 : Jean Rouch écrivait : « …nous reprenons les Regards Comparés consacrant cette fois-ci ces rencontres non pas à une seule ethnie mais à un seul territoire : l’archipel de la Nouvelle Guinée ».
en 1989, nous partions sur les traces de Nanook pour une nouvelle édition des Regards Comparés consacrée  aux Inuit du Groenland.

Après une assez longue interruption, ces manifestations ont été reprises, gérées et coordonnées par Françoise Foucault et Laurent Pellé :
en 2000 : les Dogon du Mali (hommage à Germaine Dieterlen);
en 2001 : les Aborigènes d’Australie ;
en 2002 : le Brésil, Identités religieuses, du Candomblé au Pentecôtisme ;
en 2003 : Madagascar, Histoire, identités, diversité ;
en 2004 : Iran, Nomadisme, rituels, musique ;
en 2005 : Mongols, de la steppe à la ville, nomadisme et chamanisme ;
en 2006 : Identités françaises et immigrations ;
en 2007 : Musiques en lieux d’Islam.

Nous sommes restés fidèles aux principes mêmes de ces rencontres comme les avaient définis Jean Rouch : confronter les différents regards cinématographiques portés par des ethnologues, des cinéastes, des géographes, des voyageurs, des aventuriers… sur un même peuple, une même culture ou une même aire géographique. Aujourd’hui cependant l’expérience s’est enrichie : ce ne sont plus seulement des regards comparés entre « spécialistes » de l’altérité mais un retour s’est opéré. L’arroseur arrosé des Frères Lumière est devenu l’ethnologue ethnologisé et l’ancien « indigène » s’est emparé de « nos » instruments pour nous interroger et s’interroger lui-même. Les Yanomami, les Bushmen, les Inuit, les Papous, les Aborigènes, les Amérindiens, les Malgaches et bien d’autres font des films sur leurs propres cultures et parfois sur nous…

Ces « Regards Comparés » sont désormais devenus aussi des

« Regards Partagés ».